Instantanément, dans ma tête, mon démon et mon ange gardien se mettent à dialoguer :
- « Va te faire foutre » ! Il ne s’est même pas donné la peine de répondre à mon petit message qui disait que ça n'allait pas fort, et maintenant, il vient prendre des nouvelles. Ben voyons !
- Mais Marie, t’es pas sympa. Ces’t quand même gentil de sa part, de venir prendre des nouvelles. Ça veut dire qu’il pense à toi !
- Il pense à moi ? Tu parles. Même pas « bonjour ma sœur », même pas « Bisous ». Que dalle ! Et puis, il vient aux nouvelles quand il pense que la vague est derrière. Mais t’as raison... on pourrait répondre « Qu’importe ? » alors ? Comme ça, on répond, mais on dit rien.
- Il va se sentir agressé, tu le sais bien. Toi, tu sais avec quel ton tu dis ça, mais lui non. Et connaissant P., il va mal le prendre.
- Oui ben quoi ? « Bof. Un jour, je trouverai ma solution… »
- Ah ben oui, t’as raison. Fais lui tu chantage au suicide, tant que tu y es ! Non, mais vraiment, n’importe quoi !
- Alors on répond pas !
- …
C’est sans fin. Pourtant je suis dans un jour actif, un de ces jours où je suis positive, où j’en veux, où je dépote… Sur le thème « travaux en bâtiment », dans ma très vieille maison qui a grand besoin de soins, pour aujourd’hui. Je suis en train de passer un enduit de lissage sur les murs décapés. Je suis devant mon mur, debout sur un tabouret, mes spatules à la main, mon enduit dans une gamelle posée sur les toilettes et dans ma tête, c’est un débat infernal. J’en ai conscience, j’écoute mais je n’arrive pas à arrêter ça. Respirer, observer ses gestes, décrocher de ses pensées. La spatule, et le mur, rien que la spatule et le mur. Lâcher prise. La vache ! Que c’est dur ! Je suis une machine à penser et ces pensées me détruisent totalement.
Je change d’activité, mais rien à faire, mes pensées ne restent pas aux toilettes, elles me suivent. Je persiste encore un moment, et finalement, physiquement fatiguée de mes travaux, je me dis que le mieux serait de toutes façons de faire une pause. Quand j’étais gamine, ma mère me disait toujours : « Quand on est fatigué, il faut s’arrêter. Quand on s’entête, on se met à faire des bêtises. »
Alors, OK, je m’arrête et je m’offre une petite balade. A la sortie du village de N., un petit chemin m’inspire. Il longe d’abord un pré très pentu que je trouve très beau, mais il est entouré d’un barbelé peu engageant, et bien serré. "Hummm... difficile de passer dessous." Et puis tout d'un coup, smile. Du jamais vu : il y a là, sous mes yeux, une petite échelle de bois moussu toute prête à me faciliter le passage !
Hop, en quelques sauts je suis dans mon pré et me mets à le parcourir à l'affût de jolies plantes. Je ne m'en rends pas compte tout de suite, mais ma tête s'est arrêtée instantanément de faire des bulles inutiles. J me retrouve comme une petite gamine dans mon pré, à m'émerveiller d’une fleur, d'une couleur, d’un brin d’herbe, d’un rien ! Je grimpe, je grimpe... je découvre des orchidées sauvages que j'adore : orchis pyramidaux, orchis bouc, orchis homme pendu (l'un de mes préférés, si fin, si subtile). Je me couche devant pour mieux le prendre en photo, ... et manque me percer le tympan avec une herbe sèche. Hi hi !.
Je grimpe, je grimpe. Du thym serpolet, des hommes pendus encore. Je suis un petit poucet qui suit des fleurs au lieu des petits cailloux. A l'affût. Je ne me décide, cette fois, à passer sous un barbelé qui m’entrave pour pouvoir grimper plus haut encore. Je prends peur du cri rauque, presque un aboiement, d'un animal. Bah, ... c'est probablement un chevreuil mais il ne m'arrêtera pas ! J’attends un instant puis passe sous mon barbelé et me retrouve dans une zone sauvage hésitant entre forêt, éboulis de cailloux, prairie sèche et mousses lumineuses. La fin d'après midi est délicieuse, miraculeuse. C‘est beau, c’est beau ! Le soleil m'offre des lumières divines, les oiseaux chantent délicieusement. Je me sens bien ici, seule, paisible, émerveillée. Je respire la nature, je goûte chaque délice qu'elle m'offre. C'est divin !
Je me perds à travers bois avec un plaisir inoui ! Je suis vraiment dans mon élément, là. Je suis juste ici et maintenant à déguster égoïstement le cadeau d'une merveilleuse journée de printemps ! Ma tête est vide, enfin ! J'ai réussi à lâcher prise !!!! Hourra !!!!